Entreprises téméraires: Risques de réduction des prestations
Aides de travail appropriées
Risques et entreprises périlleuses
Pratiquement tous les collaborateurs exerçant une activité dépendante sont soumis, à quelques exceptions près, à l’assurance accidents obligatoire. Les collaborateurs qui travaillent plus de 8 heures par semaine sont également assurés obligatoirement contre les accidents non professionnels.
Selon la loi (art. 4 LPGA), un accident est toute perte, totale ou partielle, de l’aptitude de l’assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d’activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d’une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique.
Pour des raisons spécifiques, l’assurance accidents peut réduire ou même suspendre ses prestations (art. 36-42, 46 LAA et art. 47-50 LAA ainsi qu’art. 21 LPGA).
Si l’accident est dû à des risques extraordinaires ou à un péril spécifique, la loi sur l’assurance accidents (LAA) prévoit des réserves spéciales. Les risques et les périls extraordinaires sont des risques qui dépassent de manière considérable ceux de la vie courante.
Ils débouchent souvent sur des accidents et leurs conséquences économiques peuvent déboucher, selon les circonstances, sur des augmentations de primes pour l’employeur comme pour les collaborateurs. Pour l’employeur, le risque d’augmentation de primes est avéré lorsqu’il participe spontanément aux primes des accidents non professionnels. Dans l’assurance accidents professionnels, des risques élevés peuvent être couverts par des tarifs spéciaux de primes. Mais cela est impossible dans les accidents non professionnels. La loi prévoit ainsi, dans l’assurance des accidents non professionnels, le refus des prestations d’assurance ou la réduction des prestations monétaires dans diverses situations.
Notion d’entreprises téméraires
Les entreprises téméraires sont celles par lesquelles l’assuré s’expose à un danger particulièrement grave sans prendre de mesures destinées à ramener celui-ci à des proportions raisonnables ou sans pouvoir prendre de telles mesures (art. 39 LAA et 50 al. 2 OLAA).
Il existe une liste des disciplines sportives et des activités considérées comme entreprises téméraires relatives ou absolues établie par la Commission ad hoc sinistres LAA. (recommandation no 5/83, disponible sur le site de l’Office fédéral de la santé publique, www.bag.admin.ch/index.html). Ces recommandations ne sont toutefois pas contraignantes, de sorte que les assurances disposent d’une certaine marge de manœuvre dans l’appréciation du cas (ATF 114 V 315).
Notion d’entreprise téméraire absolue
Il y a entreprise téméraire absolue lorsqu’une activité :
- comporte des risques particulièrement importants, indépendamment de l’instruction, de la préparation, de l’équipement et des aptitudes de l’assuré;
- implique des risques dont la pratique ne répond à aucun intérêt digne de protection ou qui peut être considérée comme déraisonnable ou répréhensible.
Les périls absolus sont par exemple:
- Base Jumping
- Compétitions de boxe
- Bris volontaire de verre
- Courses resp. entraînement automobile
- Cours de motocross, entraînement compris
- Plongée à une profondeur supérieure à 40 mètres
- Courses de Downhill Biking
- Record du kilomètre lancé à ski
- Speedflying
- etc.
Notion d’entreprise téméraire relative
Il y a entreprise téméraire relative dans les cas des activités qui comportent des risques élevés, qui peuvent toutefois être limités à un niveau admissible si l’assuré remplit certaines exigences sur le plan des aptitudes personnelles, du caractère et de la préparation.
Il faut déterminer, compte tenu des capacités personnelles de l’assuré et du type d’exécution si une réduction des risques aurait été possible et si celle-ci a été négligée ou non
Les périls relatifs sont par exemple:
- Escalade ou alpinisme
- Activités sportives à ski en dehors des pistes balisées
- Vol en parapente et en deltaplane lorsque les conditions météo sont très défavorables
- etc.
Les périls relatifs débouchent généralement sur une réduction des indemnités journalières, notamment si celui qui s’adonne aux genres de sports/activités liés à de grands risques ne tient pas compte des règles usuelles ou des exigences de prudence d’une manière avérée (équipement, expérience, avertissements, indications).
Recommandations de produits
En ce qui concerne les prestations, il convient de distinguer trois catégories, le sauvetage, les traitements médicaux et enfin les prestations en espèces.
- Sauvetage : le sauvetage d’une personne est couvert par l’assurance, même s’il peut être considéré comme une entreprise téméraire.
- Traitements médicaux : même en cas d’entreprise téméraire, l’assurance accidents prend en charge les frais de traitement ainsi que le coût des moyens auxiliaires destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction.
- Prestations en espèces : en cas d’accidents non professionnels dus à une entreprise téméraire, les prestations en espèces sont réduites de moitié ou refusées dans les cas particulièrement graves (art. 50 al. 2 OLAA). On peut citer comme exemple d’une entreprise particulièrement dangereuse qui permet à l’assurance de refuser le versement de prestations en espèces la randonnée en montagne très difficile effectuée en solitaire, par mauvais temps et malgré la mise en garde d’alpiniste expérimenté.
Par prestations en espèces, on entend :
- Les indemnités journalières qui se substituent aux revenus de l’activité lucrative en cas d’incapacité de travail.
- La rente d’invalidité a pour but de compenser une incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée.
- L’indemnité pour atteinte à l’intégrité est versée lorsque l’assuré souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique.
- L’allocation pour impotent versée lorsque l’assuré a besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour ses besoins quotidiens.
- La rente de survivants remplace la perte de soutien résultant du décès de l’assuré des suites d’un accident (peut être versé aux enfants et, dans certaines circonstances au conjoint survivant ou divorcé).
Obligations de l’employeur en cas de refus de prester de l’assurance
L’art. 324b CO trouve application en matière d’assurance accident. Selon l’art. 16 LAA, le droit à l’indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l’accident. Dans l’intervalle, l’employeur doit, selon l’alinéa 3 de l’art. 324b, verser les 4/5ème du salaire.
L’obligation de l’employeur de verser le salaire durant le délai de carence est ainsi soumise à un certain nombre de conditions :
- en premier lieu, on doit nécessairement se trouver en présence d’un accident au sens de l’art. LPGA ;
- ensuite, l’accident ne doit pas avoir été provoqué fautivement par l’assuré ;
- l’assuré ne doit pas avoir épuisé son droit au versement du salaire selon l’art. 324a al. 1-3 CO ;
- le contrat doit avoir été conclu pour, ou avoir duré plus de trois mois.
Pour apprécier le degré de la faute et l’obligation de l’employeur de verser le salaire, il est nécessaire de prendre en considération l’intérêt du travailleur, notamment au respect de ses droits constitutionnels. Une éventuelle faute doit être niée lorsque les intérêts du travailleur l’emportent sur ceux de l’employeur dans l’accomplissement du travail. Il en va ainsi des risques pris volontairement par le travailleur, mais dont le principe de la liberté personnelle empêche de lui interdire l’exercice (ski, escalade, plongée, etc.). Tel n’est en revanche pas le cas de la témérité laquelle présente l’acceptation d’un danger extraordinaire et accru. Dans ce cas, l’empêchement doit être considéré comme fautif et l’employeur libéré de son obligation de verser le salaire durant l’incapacité de travail.
Décisions du Tribunal fédéral
Les sauts acrobatiques en vélo sur une colline artificielle (Dirt Jumping) sont considérés, en termes du droit des assurances, comme une entreprise absolument périlleuse. L’assurance accident réduira ainsi ses indemnités journalières si un Biker se blesse pendant ce type d’activité. Que l’accident ait eu lieu pendant une compétition ou lors de l’exercice pendant les loisirs n’a aucune espèce d’importance (8C_762/2014 du 19.1.2015).
Quiconque a été pris en otage par des Talibans et souffre, une fois libéré, de symptômes post-traumatiques n’aura aucun droit à des prestations monétaires (indemnités journalières) de l’assurance accidents. Selon le Tribunal fédéral, un voyage à travers les régions nord du Pakistan sans escorte armée constitue une entreprise absolument périlleuse (8C_695/2014 du 6.2.2015).
Exemple de réduction
Un skieur (assuré contre les accidents) fait du hors piste avec un collègue. Les deux sont passés au-dessous d’une signalisation par câble. La piste sélectionnée est très raide, les deux glissent et déclenche une avalanche. Celle-ci emporte les deux skieurs et s’ils parviennent à y survivre, les deux souffrent de différentes fractures aux bras et aux jambes.
L’employé assuré doit maintenant s’attendre des réductions de la part de l’assurance accidents. Selon le bulletin d’information qui se trouvait sur le panneau d’affichage dans la zone de ski, il existait, ce jour-là, un risque considérable d’avalanche. En outre, la zone était signalisée par des cordes d’interdiction tout au long.
Les deux skieurs ont ignoré ces alertes, ils ont quitté la piste et ils ont skié dans une zone très pentue.
L’assurance est partie ici du principe d’une entreprise périlleuse. Les prestations ont été réduites de 50%.
Les skieurs assurés percevaient un salaire mensuel de CHF 6 000 x 13. Ce qui donne des indemnités journalières à hauteur de CHF 171,00 (6 000 x 13 mois /365 jours x 80%). A 50%, cela fait CHF 85,50. S’ils perçoivent une indemnité pendant 50 jours, la réduction signifie, pour eux, une perte de CHF 4 275,00 (50 x CHF 85,50). L’employeur n’a aucune obligation d’assumer cette différence.
L’assurance accidents complémentaire offre la possibilité de couvrir la différence, les risques supplémentaires ou la négligence grave (protection étendue d’assurance). Des réductions du fait d’un comportement négligeant ou en cas d’entreprise périlleuse sont alors compensées dans ce genre de solution d’assurance. L’assurance accidents complémentaire permet aussi de bénéficier, par rapport à l’assurance accidents LAA, de prestations complémentaires en capital en cas de décès ou d’invalidité, elle offre des indemnités journalières supérieures ou, pour ce qui concerne les frais de traitement, la couverture en division semi-priée ou privée dans les hôpitaux.
Les accidents en cas d’activités sportives normales telles que le ski, le vélo ou la gymnastique sont assurés dans la mesure où la personne n’a pas agi sous le coup d’une négligence grave.
Les opérations de sauvetage sont toujours couvertes, même s’il s’est agi d’entreprises périlleuses.
Pour que les prestations monétaires soient totalement refusées, il faut que des circonstances spécifiques soient données. Par exemple le fait de faire de l’escalade dans un état d’ébriété avancé sur une façade dangereuse alors qu’il fait nuit ou le fait de partir tout seul faire un tour en montagne alors que les conditions météo sont mauvaises malgré des avertissements par des alpinistes expérimentés.
Les assurances et la SUVA recommandent aux collaborateurs qui font des sports dangereux de souscrire une assurance accidents individuelle privée pour inclure certains risques, le cas échéant au sein de l’association sportive considérée qui peut proposer ce genre d’assurance collective à ses membres.
Quiconque s’adonne à des sports risqués doit se renseigner précisément pour voir dans quelle mesure l’assurance accidents couvre le risque en question.
Quelles sont les conséquences des entreprises périlleuses sur les prestations de l’AI et de la prévoyance professionnelle (LPP)?
Le concept d’entreprise périlleuse n’existe pas pour les assurances du premier pilier (AVS/AI). Selon l’art. 35 LPP (2e pilier), une institution de prévoyance peut réduire ses prestations lorsque l’AVS/AI réduit sa propre prestation, qu’elle la supprime ou qu’elle la refuse parce que la personne bénéficiaire a provoqué son invalidité ou son décès suite à une faute grave. L’assureur LPP est lié par la décision de l’AVS/AI.
Dans le domaine de l’AVS/AI, la réduction des prestations est régie essentiellement par l’art. 21 LPGA resp. par l’art. 7b LAI. Les entreprises périlleuses ne sont pas mentionnées dans ces articles. Un acte jugé indépendamment du fait qu’il s’agisse d’une entreprise périlleuse au sens de la LAA ou non et qui débouchera sur une réduction selon l’art. 35 LPP sera apprécié dans le cas individuel et en fonction des circonstances présentes. Dans ce contexte, l’étendue d’une éventuelle réduction de l’AVS/AI se verra accorder une certaine attention.
Principales prestations monétaires de l’assurance accidents
- Indemnités journalières / rentes d’invalidité
- Indemnités pour personnes en détresse
- Indemnités d’intégrité
- Rentes de survivants
Informations complémentaires
Liste des sports qui sont considérés comme des entreprises périlleuses au sens de l’art. 39 LAA.