Travail auto-organisé: Le rôle d’un cadre dans l’auto-organisation

L’auto-motivation, la volonté permanente d’apprendre, un haut niveau de liberté, une flexibilité maximale et de vastes possibilités de participation sont des éléments courants de l’auto-organisation. Au lieu d’attendre des décisions venant d’en haut, on prend conseil – et c’est obligatoire – auprès des collègues, on décide ensuite seul et on assume la responsabilité de ses choix. Cela implique une absence de sanction en cas d’erreur.

03/08/2022 De: Anne M. Schüller
Travail auto-organisé

Dans ce contexte, la responsabilité signifie d’assumer les conséquences à la fois de ses propres décisions et des actions du groupe et de pouvoir en rendre compte auprès d’une instance.

Cette instance peut être un bureau externe (le client, l’entreprise) ou soi-même. Six ingrédients sont requis pour obtenir une disposition à la prise de responsabilité:

  1. les connaissances nécessaires
  2. les capacités nécessaires
  3. des règles de coopération
  4. une marge de manœuvre pour l’épanouissement
  5. du soutien
  6. la tolérance interne aux erreurs

Dans l’auto-organisation, les prestations de chacun sont transparentes. Elles sont discutées en équipe et sont également revendiquées par l’équipe. Des arrangements clairement formulés et des règles établies en commun sont par exemple fixés dans un carnet d’équipe. Leur non-respect génère une pression sociale et est sanctionné. Cependant, cela ne se produit que très rarement. En effet, les collaborateurs sont à la fois responsabilisés et hautement motivés car ils reçoivent une grande liberté de conception, remportent des victoires communes, se développent et voient le sens de leur travail dans un contexte global.

Le rôle d’un cadre dans le travail auto-organisé

Dans les entreprises modernes qui empruntent la voie du travail auto-organisé, la direction n’a plus rien à voir avec un pouvoir formel qui utilise l’arsenal des ordres et de l’obéissance. Les cadres dont nous avons besoin aujourd’hui sont des bâtisseurs qui construisent l’avenir. Leur première mission est de mener les personnes à travailler ensemble de la manière la plus efficace possible et à prendre de bonnes décisions.

Ces cadres agissent en interaction et dans le dialogue, ils posent plus de questions qu’ils ne dictent de réponses, ils parlent d’égal à égale plutôt que par voie d’autorité. Les décisions opérationnelles ne reviennent plus au dirigeant de la vieille école, au supérieur disciplinaire (quel mot horrible), mais à l’équipe respective, ce qui accélère fortement les choses. Les entretiens d’instruction et de contrôle disparaissent et avec eux la peur et l’angoisse. Cela permet l’apparition d’espaces d’épanouissement pour des résultats vraiment excellents.

Le leadership n’est donc plus un poste hiérarchique et il n’est plus distribué centralement sur quelques rares épaules. Dans les entreprises progressistes, il est séparé de la mentalité élitiste et son rôle est lié à la définition de tâches et à des projets. Dans les organisations avec un haut niveau du travail auto-organisé et de nombreux projets, les rôles changent en fonction de la situation: une personne peut être un jour chef d’un projet et un autre collaborateur dans un projet sous la direction d’une autre personne. Les besoins en connaissances de direction augmenteront donc. Il faudra aussi en conséquence développer la compétence de direction chez plus de collaborateurs.

La différence entre la décision par un tiers et l’auto-organisation apparaît clairement à l’aide d’un petit exemple:

  • «Construisez un pont au-dessus de ce fleuve! Faites-le comme ci et comme ça!», ordonne un dirigeant classique de manière dirigiste et orientée sur les exigences.
  • «Nous devons traverser ce pont! Trouvez quelle est la meilleure possibilité et mettez-la en œuvre ensemble», dit un leader de manière encourageante dans l’auto-organisation.

L’auto-organisation comporte ainsi également des dirigeants. Mais ceux-ci n’agissent pas comme des micro-managers et souverains absolus, mais comme des leaders. Ils ont un rôle de modérateur, inspirateur, catalyseur et facilitateur. Ils ont donc surtout besoin d’intelligence émotionnelle et de compétence sociale. Ils éliminent les obstacles et créent des espaces libres afin de laisser la place pour un sprint. Protégés par les garde-fous de la coopération, ils veillent à garder le cap vers un grand objectif commun. Ils n’interviennent de manière directive qu’en cas d’urgence. Autrement, leur action est essentiellement encourageante et un soutien.

Ce qui ne doit surtout pas se passer une fois le travail auto-organisé introduite: un cadre retombe dans le rôle du chef et renverse une décision de groupe «en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés». Tout serait alors gâché! Un seul mot autoritaire peut suffire à briser à l’avenir toute initiative. Si l’on emprunte la voie de l’auto-organisation collégiale, les «dirigeants» doivent supporter les décisions qu’ils n’auraient pas forcément prises eux-mêmes et autoriser des méthodes que l’on ne peut pas contrôler. Il faut par ailleurs accepter que ses propres méthodes ne sont pas forcément la référence ultime, mais que d’autres voies, éventuellement meilleures, peuvent aussi mener au but. Le cas échéant, demandez un droit de véto pour le cas où des considérations stratégiques s’opposeraient à ces décisions ou pour les cas d’urgence ou encore s’il faut prendre en compte des motifs de responsabilité juridiques.

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