Contrat d’expertise: Généralités
Aides de travail appropriées
Introduction
Il s’agit d’une obligation de diligence, dans la mesure où l’expert garantit de faire de son mieux, et non une obligation de résultat.
Le contrat d’expertise tel qu’envisagé ci-après, n’est confié que par un ou plusieurs privés qui posent les questions pour lesquelles ils attendent des réponses.
Lorsque le mandat est confié par une autorité judiciaire, il ne s’agit plus d’un contrat de droit privé mais d’opérations de procédure qui sont réglées par les règles de procédure (p. ex. procédure civile, pénale ou administrative). Il en résulte qu’une expertise privée n’a pas les qualités requises pour être considérée comme expertise judiciaire. Certains codes de procédure considèrent les expertises privées, comme des “allégués de parties, de nature technique”.
Il peut arriver que les parties choisissent un collège d’expert (en général un nombre impair), soit que chaque partie choisisse son expert et que les deux experts choisis désignent le 3e expert.
L’expertise peut porter sur une immense diversité de situations telle que la santé d’une personne, sa capacité de travail, la valeur d’un objet, la vérification de la qualité d’une œuvre d’art, l’explication de la façon dont un accident est survenu, le rendement d’une machine, la cause d’un défaut, la façon dont il faut réparer un ouvrage, la possibilité de faire une construction etc.
L’expertise peut être engagée dans un cadre conflictuel (des personnes sont en litige sur une question que les compétences de l’expert pourra éclaircir), ou simplement en présence d’intérêts divergents (l’assuré tient à avoir une couverture d’assurance, cette dernière est d’accord mais pas à n’importe quelle condition) mais également non conflictuel (une personne souhaite simplement avoir des renseignements techniques).
Obligations de l’expert
L’expert qui se voit confier un mandat doit assumer les obligations habituelles du mandataire.
Il doit notamment disposer des connaissances nécessaires pour exécuter le mandat et il est de son devoir de refuser un mandat pour lequel il apparaît d’emblée qu’il n’a pas les compétences nécessaires. Si en cours de travail, il découvre cette absence de compétences, il doit clairement le signaler au mandant. En outre, les connaissances de l’expert doivent également porter sur les données scientifiques ou technologiques récentes.
L’expert se doit de répondre au plus près des questions qui lui sont formulées. Il doit également veiller à la façon dont elles sont formulées (par exemple, il évitera que la formulation de la question puisse donner une impression fausse: si une expertise ne peut aboutir qu’à un résultat d’exclusion, la question ne doit pas être formulée dans le sens que l’expertise établirait un résultat positif: par exemple la présence de tel groupe sanguin permet d’exclure toutes les personnes qui ne sont pas de ce groupe, par contre elle ne permet pas de dire qu’à l’intérieur de ce groupe sanguin, c’est une personne plutôt qu’une autre). En effet, il est mieux placé que le mandant pour savoir quels types de moyens peuvent être employés et quels sont les résultats.
Il doit également disposer de temps, de matériel, de personnel suffisamment qualifié et de tous les éléments nécessaires pour effectuer son travail dans des conditions décentes.
L’expert doit également faire preuve d’intégrité, notamment en refusant d’avantager une partie, en signalant au mandant des faits que celui-ci ignore, qui sont en rapport avec l’expertise elle-même ou des circonstances importantes pour l’exécution de celle-ci. Il doit notamment leur signaler ses éventuels rapports professionnels dans la mesure où ceux-ci feraient obstacle à la bonne exécution du contrat. Il doit également, comme tout mandataire attirer l’attention des parties sur la question du coût de son travail. Comme dans beaucoup de mandats, la double représentation (ce que l’on appelle servir deux maîtres à la fois, en langage imagé) n’est possible que si les divers mandants sont clairement informés et acceptent cette situation en pleine connaissance de cause.
Il est souhaitable pour toutes les parties (expert et mandataire) que l’expert fournisse des explications scientifiques ou en tout cas rationnelles, qui permettent de vérifier la bonne qualité de son travail. En cas de contestation de l’expertise, les vérifications n’en seront que plus simples.
Il est également souhaitable que les parties fixent la date ou les échéances où l’expert devra déposer son travail, voire des résultats intermédiaires.
Obligations du mandant
La principale obligation est naturellement le paiement des honoraires.
Dans la mesure où les parties disposent d’éléments nécessaires à l’expertise, elles doivent collaborer. Ainsi la partie qui doit fournir des explications (p. ex. sur la provenance d’un objet) doit le faire de façon juste ou complète. Autre exemple de collaboration, le propriétaire d’un immeuble doit laisser l’expert y accéder si celui-ci doit déterminer la cause d’un dommage. Entre également dans les obligations du mandant celle de libérer les personnes qui sont tenues à un secret (médecins, banquiers, avocats etc.).
Quelques remarques sur l’expertise
Il est usuel mais non obligatoire, que l’expert indique les faits constatés par lui, qui lui ont été rapportés par des tiers, les documents auxquels il a eu accès et les moyens mis en œuvre pour son activité. Cela permet aux lecteurs de poser des questions supplémentaires si elles ont connaissance d’autres faits. L’expert peut se justifier par rapport à une autre expertise si celle-ci repose sur un autre état de fait.
Une expertise est particulièrement appréciée si elle est claire, précise et compréhensible. C’est un art que de vulgariser des connaissances. Les résultats doivent être pragmatiques. On évitera ainsi les phrases du genre: le propriétaire prendra les mesures adéquates (dans un tel cas l’expert s’expose naturellement à la question évidente: quelles sont ces mesures?). Sous l’angle du pragmatisme, l’expert doit avoir à l’esprit que les questions financières sont souvent importantes, pour ne pas dire essentielles.
La pratique met en général une question du genre “avez-vous d’autres éléments à signaler/d’autres observations à formuler etc.”. Ce genre de question permet à l’expert de fournir des compléments utiles, de suggérer d’autres moyens d’investigation.
Cas particulier de l’expertise médicale dans les assurances sociales
Depuis le 1er janvier 2022, une Commission fédérale d’assurance qualité des expertises médicales a été mise en place par le Conseil fédéral.
Cette commission a pour but de surveiller, pour toutes les assurances sociales, l’habilitation des centres d’expertises, le processus d’expertise ainsi que les résultats des expertises médicales.
La Commission a également pour tâche d’élaborer des recommandations sur les points suivants :
- Exigences et normes de qualité pour le processus de réalisation des expertises ;
- Critères relatifs à l’activité des spécialistes ainsi qu’à leur formation ;
- Critères relatifs à l’accréditation des centres d’expertises et à leur activité ;
- Critères et outils relatifs à l’évaluation qualitative des expertises.
Il faut savoir qu’il existe depuis plusieurs années des lignes directrices pour l’expertise médicale pour la psychiatrie et la rhumatologie. Dans un arrêt du 3 juin 2015 (ATF 141 V 281), le Tribunal fédéral a émis sous la forme « d’indicateurs standards », de nouvelles normes contraignantes pour l’établissement d’expertises.
Références croisées
Le contrat d’expertise présente parfois de fortes ressemblances avec l’arbitrage, notamment avec la solution dite de “l’arbitre-expert”. Dans un tel cas, le rôle de l’arbitre ne porte pas seulement sur le fait de fournir des indications techniques à une ou plusieurs personnes, mais également à trancher un litige qui sépare des parties.
Certains mandataires, par exemple les médecins, fournissent des renseignements techniques à leurs patients. Il ne s’agit pas d’une expertise proprement dite, dans la mesure où ces renseignements ne sont pas fournis exclusivement à titre informatif, mais ils font partie d’un ensemble plus large, par exemple le traitement.
L’expertise se différencie du devis, dans la mesure où celui-ci n’est qu’une simple estimation n’impliquant aucune compétence professionnelle particulière, mais uniquement des connaissances standard (combien coûtera la réparation de ma voiture). L’expertise exige un degré d’analyse un peu plus approfondi que ces connaissances.