Contrat de construction: Ses généralités
Aides de travail appropriées
La notion « contrat de construction »
Le droit de la construction est défini par Pierre Tercier comme « l’ensemble des règles de droit public et privé qui régissent la construction immobilière, au sens large des termes ». Il se distingue par sa grande complexité et par de nombreuses subtilités dues au concours de règles relevant du droit privé ou public.
Construire, restaurer ou démolir un immeuble suppose l’intervention d’un nombre considérable de personnes et d’entreprises, chacune compétente dans son domaine. Si les travaux sont importants, l’acte de construire, de restaurer ou de démolir est soumis à une autorisation qui est délivrée, en principe, par l’autorité cantonale, après préavis de la commune où se situe l’immeuble. Elle doit aussi être conforme à l’ensemble des règles fédérales et cantonales en matière d’aménagement du territoire.
En cas de non-respect de ces règles, il convient de mentionner que le contrevenant s’expose à des sanctions relevant du Code pénal (p. ex. accident sur un chantier, dommages à la propriété, violation des règles d’art de construire) ou de législations pénales accessoires.
Le droit de la construction se divise en deux parties:
- droit privé de la construction
- droit public de la construction
Le terme « contrat de construction » peut désigner tout type de contrat conclu dans le cadre d’un projet immobilier, en particulier les contrats d’entreprise ainsi que les contrats de mandat.
Il sera ici question du contrat de construction en tant que contrat d’entreprise (art. 363 CO). La caractéristique principale de ce contrat réside dans le fait que le constructeur a l’obligation d’exécuter des travaux de construction, avec ou sans fourniture de matière, en vue de réaliser une construction immobilière.
Les parties au contrat de construction
Les parties au contrat sont l’entrepreneur et le maître.
L’entrepreneur peut avoir la qualité d’entrepreneur individuel, général ou total, ou encore former un consortium d’entrepreneurs :
- L’entrepreneur individuel réalise l’ouvrage demandé. Si l’ouvrage est complexe, le maître peut confier l’exécution des travaux à différents entrepreneurs partiels ou co-entrepreneurs, chargés chacun d’une partie déterminée. Les divers entrepreneurs travaillent sur la base de contrats distincts et séparés, passés avec le maître. La direction des travaux et la coordination entre les différents entrepreneurs incombent au maître qui peut les déléguer à l’architecte ou à l’ingénieur, voire nommer un coordinateur au travail ou au chantier.
- L’entrepreneur général s’engage envers le maître à exécuter la totalité d’un ouvrage ou une partie importante, peu importe la nature de ces travaux. Le maître ne conclut qu’un seul contrat, portant sur l’ensemble de l’ouvrage et de ses travaux, avec l’entrepreneur général qui se distingue des co-entrepreneurs. A son tour, l’entrepreneur général passe des contrats de construction avec d’autres entrepreneurs, chacun spécialisé dans sa branche, appelés aussi sous-traitants. Le maître n’a aucune relation juridique avec les sous-traitants et il n’est pas autorisé à leur donner des ordres.
- L’entrepreneur total s’engage à concevoir et à faire les plans de l’ouvrage, en plus des prestations de l’entrepreneur général. En fait, le maître achète un ouvrage complet, y compris la phase de planification, auprès d’une seule personne. Il est aussi chargé des prestations de l’architecte et de l’ingénieur. Au niveau juridique, ce contrat est considéré comme un contrat d’entreprise au sens de l’art. 363 CO.
- Un consortium d’entrepreneurs regroupe plusieurs professionnels, qui concluent en leur nom collectif un contrat pour l’exécution de la totalité d’un ouvrage ou d’une partie des travaux. Ce contrat est soumis aux règles du contrat d’une société simple, au sens des art. 530 ss CO.
Le maître de l’ouvrage peut être un particulier, une société ou une entité relevant du droit public (Confédération, cantons, communes, établissement public). Cela n’a aucune conséquence sur la nature juridique du contrat de construction qui reste toujours du droit privé. Le maître d’ouvrage de droit public agit comme un entrepreneur privé et, en conséquence, est soumis aux règles du droit privé. Il n’agit pas dans l’exercice de la puissance publique, peu importe que l’ouvrage à réaliser fasse partie du domaine public (p. ex. route, pont, tunnel) ou du domaine privé (p. ex. école, hôpital, bâtiment administratif). La conclusion du contrat peut néanmoins être soumise au droit des marchés publics.
Recommandations de séminaires
Conclusion du contrat de construction
La conclusion d’un contrat de construction est souvent précédée d’un appel d’offres, appelé aussi mise en soumission, réalisé auprès de plusieurs entrepreneurs, sur la base de documents remis par le maître et/ou son(ses) mandataire(s).
L’appel d’offres vise à obtenir le meilleur rapport qualité/prix et a pour but de mettre au concours différents entrepreneurs.
La soumission est l’acte juridique par lequel un entrepreneur (le soumissionnaire) est candidat à un marché par adjudication et offre d’accomplir les prestations requises. La procédure de mise en soumission relève du droit privé et du droit public.
Le concours (cf. notamment Règlement SIA 142) est un mode particulier de mise en soumission. C’est un concours organisé par le maître qui invite divers concurrents à préparer des projets.
La procédure de mise en soumission de droit privé ne fait l’objet d’aucune disposition particulière dans le CO. En conséquence, elle fait appel aux principes généraux sur la conclusion du contrat (art. 3 ss CO), en l’absence de dispositions conventionnelles spéciales.
Les parties peuvent néanmoins convenir de l’application de la Norme SIA 118 (notamment art. 3 à 22), qui traite spécialement de la mise en soumission et de l’adjudication des travaux de construction. Elle acquiert force obligatoire si les documents de mise en soumission la déclare partie intégrante et fait ensuite partie du contrat. Les entrepreneurs participant à cette soumission acceptent de s’y conformer (cf. art 16 Norme SIA 118).
La procédure de soumission comprend trois phases :
- L’appel d’offres : sur la base d’un projet de réalisation, le maître prépare les documents de la mise en soumission (art 7 ss Norme SIA 118) et invite des entreprises à lui présenter une offre. Il peut s’adresser à un cercle d’entreprises déterminées au préalable (soumission restreinte) ou à toutes les entreprises (soumission ouverte). Les documents de l’offre de mise en soumission doivent mentionner les points essentiels du contrat.
- Le dépôt de l’offre : les entreprises intéressées doivent déposer leur offre dans le délai fixé par les conditions de la soumission et sont liées jusqu’à son expiration. L’offre doit être conforme à la soumission. Toute modification de l’offre ne lie pas le maître et doit faire l’objet d’un document séparé (art 15 Norme SIA 118). Elle a valeur de contre-offre et sera examinée selon les principes généraux des art. 3 ss du CO.
- L’examen des offres et l’adjudication : le maître procède à l’examen des offres et adjuge les travaux à l’entreprise qui lui paraît la plus intéressante. Dès sa communication à l’entreprise, l’adjudication est considérée comme une acceptation. En conséquence, les autres offres sont rejetées.
Avant l’adjudication, une phase de négociation peut avoir lieu.
Les parties sont liées par le principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC). Le maître de l’ouvrage doit faire preuve de sérieux, même s’il conserve sa liberté d’adjuger ou de renoncer aux travaux. Un manque de sérieux pourrait l’exposer à réparer le dommage subi par les soumissionnaires.
Les collectivités publiques mettant en soumission l’exécution de travaux de construction sont soumises au droit des marchés publics. La mise en soumission est dès lors réglée par le droit public. Les contrats passés ensuite demeurent cependant soumis aux règles de droit privé.
La procédure fait l’objet de lois et d’ordonnances édictées par la Confédération et les cantons. Les collectivités publiques réglementent dans ces textes les questions relatives à la mise en soumission, à la nature des travaux qui y sont soumis, aux diverses étapes de la procédure et aux critères d’adjudication.
La procédure de marchés publics présente des analogies avec celle de droit privé, mais elle s’en distingue par sa rigidité, par sa prise en compte de l’intérêt public et par sa recherche de la solution la plus avantageuse dans l’adjudication.
Les effets juridiques de l’adjudication
L’adjudication des travaux à une entreprise soumissionnaire vaut acceptation par le maître et marque la conclusion d’un contrat.
Le maître conserve sa liberté dans l’adjudication des travaux. S’il y a eu entente entre des soumissionnaires pour fausser les offres, le maître peut agir selon les règles applicables en matière de responsabilité contractuelle, selon le droit cartellaire, et demander l’annulation de l’adjudication, si nécessaire.
En cas de marché public, le soumissionnaire exclu ou non retenu peut déposer un recours si la législation applicable a été violée ou si le pouvoir adjudicateur a fait preuve d’arbitraire.
La modification du contrat de cosntruction
Une modification, c’est-à-dire le changement de tout ou partie du contrat, n’est possible que si les parties en ont convenu. L’accord qui lie les parties ne peut être modifié sans l’accord de l’autre, sous réserve de situation particulière (cf. notamment s’agissant des variations de prix dans un contrat à prix fixe les art. 38 ss de la Norme SIA 118 et l’art. 84 de la Norme SIA 118 en cas de changement secondaire de la nature de la prestation à exécuter par l’entrepreneur).